Olivia Gaiffe, infirmière indépendante, a décidé de créer un habitat partagé – L’Isle Doubs Senior – pour les seniors encore autonomes ou en perte d’autonomie à partir de 60 ans et spécialement adapté aux personnes handicapées. Andréa Abbou a quant à lui co-fondé l’application web personnalisée Ellii, qui accompagne les séniors pour trouver des activités pour rester en forme, préserver leur autonomie, lutter contre l’isolement et favoriser le maintien à domicile. Ensemble, ils reviennent sur l’expérience de la création de leur entreprise dans la silver économie à l’occasion du webinaire Entreprendre dans la silver économie.
La silver économie couvre l’ensemble des activités économiques et industrielles qui bénéficient aux seniors en améliorant leur qualité et de leur confort de vie, en favorisant une participation sociale accrue et en faisant reculer la perte d’autonomie, voire en augmentant l’espérance de vie. Tout cela se fait en prenant en compte les nouveaux besoins économiques, technologiques et industriels liés à l’avancée en âge.
« Le fléau de l’isolement a fortement progressé, beaucoup de personnes sont en manque de liens sociaux » Andréa Abbou
A qui s’adresse-t-on quand on décide d’entreprendre dans la silver économie ? Derrière les « 60 ans et plus » se cache une multitude de profils, qui sont communément répartis en trois catégories. Tout d’abord les âgés dits « actifs ». Ce sont des retraités autonomes et indépendants qui connaissent un vieillissement qualifié d’habituel et peuvent subir des atteintes de certaines fonctions considérées comme physiologiques. Ensuite, les âgés dits « fragiles ». Ce sont des personnes qui présentent des limitations fonctionnelles ainsi qu’une baisse de leurs capacités d’adaptation ou d’anticipation, parfois en raison de maladies chroniques. Enfin, les âgés « dépendants ou en perte d’autonomie » ont besoin d’être aidés pour accomplir des actes essentiels de la vie et ont donc besoin d’une surveillance régulière.
La silver économie a été structurée en filière via un contrat de filière signé en 2013 qui établissait une feuille de route proposant la mise en place d’une quarantaine d’actions, dont l’objectif était de conforter les conditions d’émergence d’un marché de services et de produits autour de l’autonomie et de la dépendance.
Face au vieillissement de la population, de nouveaux besoins émergent et, avec eux, de nouvelles opportunités. La silver économie regroupe un grand nombre de biens et de services comme le tourisme, le travail, les loisirs, l’alimentation, la sécurité, la distribution, les transports, la communication ou encore l’habitat. En effet, comme l’explique Olivia Gaiffe, « il faut une prise en charge globale pour pouvoir vieillir dans de bonnes conditions ».
« L’idée, c’est de travailler en intelligence avec l’offre existante, de compléter le maillage territorial quand c’est possible, car c’est dans l’intérêt de tous. » Andréa Abbou
La silver économie s’organise autour de trois grands axes :
La silver économie présente l’avantage d’être soutenue par une volonté politique forte et voit, depuis plusieurs années, émerger de multiples initiatives locales et territoriales (expérimentations, forums, salons, etc.).
Alors, la silver économie est-elle le nouvel eldorado des entrepreneurs ? Si le vieillissement de la population fait émerger des opportunités, le propos est à nuancer. En effet, quand les opportunités sont nombreuses, la concurrence l’est aussi bien souvent. « Beaucoup d’entrepreneurs connaissent les études démographiques. Les séniors sont sursollicités, que ce soit par téléphone ou par courrier », explique Andréa Abbou. La silver économie est aussi un marché très segmenté, que la complexité et la diversité des acteurs peut rendre difficile à appréhender pour les consommateurs.
Avant de se lancer, Andréa et Olivia ont donc pris le temps de structurer leur projet. « J’ai étudié les chiffres de l’INSEE, explique Olivia, ce qui se passait concernant le vieillissement de la population et le manque de places dans les grosses structures. Je suis partie de ça, puis j’ai étudié au niveau local ce qu’il y avait sur le territoire, j’ai référencé toutes les structures, comment elles fonctionnaient, quels étaient les tarifs, les conditions, le temps d’attente qu’elles proposaient, etc. ». Comme dans tous les secteurs d’activité, cette phase de structuration de projet est essentielle. Elle consiste notamment à travailler son modèle économique et à définir sa stratégie commerciale, ce qui nécessite d’avoir une très bonne connaissance de son marché.
Dans ce secteur très concurrentiel, « il peut parfois être judicieux de s’adosser à des institutions qui sont reconnues, car cela crédibilise la démarche auprès des séniors et peut faire la différence d’un point de vue marketing » selon Andréa qui, durant la phase de structuration de son projet, a « cherché des points d’entrée pour gagner du temps, que ce soient des associations, des clubs seniors ou d’autres endroits dans lesquels on retrouve les séniors ». Il conseille de « rester connecté à son marché » et d’être à l’écoute du public. « Une fois qu’on a constitué sa communauté, il faut écouter les séniors, leur soumettre les idées, brainstormer ensemble, faire tester les propositions, les inviter, prendre le temps d’écouter leurs retours ».
Même si un marché semble plein de promesses, quel que soit le secteur dans lequel on décide d’entreprendre, une chose reste certaine : pour créer et gérer une entreprise, il faut acquérir des savoir-faire et des savoir-être spécifiques à l’entrepreneuriat pour être en mesure de répondre aux différents besoins de son entreprise, pour être capable de s’adapter aux difficultés et aux situations imprévues et, en somme, pour pérenniser et sécuriser son projet.
« On a notre idée, on a envie d’avancer, de faire quelque chose, mais BGE nous confronte à la réalité du monde de l’entreprise, aux réalités économiques qu’il ne faut pas négliger. » Olivia Gaiffe